Aujourd'hui je vais vous parler de ma visite d'une plantation de cacao ce week-end. A peine arrivée à Belèm, où je vais rester cinq semaines, mon hôtesse me propose de partir avec elle et un autre étudiant belge dans une plantation de cacao. (Ils ont besoin de partir en reconnaissance en vue d'un projet de construction de séchoir qui aura lieu cet été.) Ne croyant pas à ma chance, j'accepte.
Tomé-Açu
Le village de Tomé-Açu est à 200 kilomètres et 4 heures de bus de Belèm. Il faut traverser plusieurs rivières, affluents de l'Amazone.
C'est la saison des pluies, il fait chaud et lourd. Les nuages dans le ciel forment leur propre paysage, inversé et monochrome.
La plantation que nous allons visiter appartient à une familles d'immigrants d'origine japonaise, arrivés au Brésil après la seconde guerre mondiale. L'immigration japonaise est très présente au Brésil et les signes de sa réussite sociale sont visibles. Y. Yamada est une grosse chaîne de supermarchés mais ce n'est pas la seule : beaucoup de magasins portent des noms japonais ou possèdent un logo ressemblant au drapeau du pays du Soleil Levant. Les supermarchés vendent des ramens adaptés aux goûts locaux, on ne compte plus les restaurants (et marchands de rues !) proposant des sushis, etc.
A peine arrivés, goûter ! (Le goûter est très important au Brésil.) Ici : thé glacé et gâteau. La génoise est parfumée au fruit de la passion (maracuja), il y a une couche de crème au cupuaçu et une à la confiture de lait. C'est délicieux.
Il fait nuit. Nous sommes sur l'Equateur, le soleil se lève à 6h et se couche à 18, toute l'année. Il n'est donc plus temps d'aller visiter les plantations, nous irons demain. La discussion est générale, bien qu'il faudrait un schéma pour démêler qui parle quelle langue, entre le portugais, le japonais, l'anglais, l'espagnol et le français.
Repas du soir. Riz japonais droit sorti du rice cooker et diverses viandes et poissons des terres environnantes : thon rôti, mouton rôti, saumon frit. Et surtout : açai. L'açai est une baie de palmier qui pousse en Amérique Latine. Dans la région du Parà, où je me trouve, elle est traditionnellement consommée sous forme de pulpe froide de couleur violet foncé, à côté du repas, un peu comme le pain chez nous. C'est une baie extrêmement calorique et pleine de fibres : historiquement, elle était utilisée par les autochtones comme aliment de base, leur permettant de compléter un régime parfois pauvre.
Je fais bien rire mes hôtes en la versant sur mon plat comme une sauce. Ça se mange normalement dans un bol séparé. Non sucré, je trouve que ça n'a pas beaucoup de goût. Ça m'a fait pensé à une sorte de béchamel épaisse. Avec du miel, c'est déjà bien meilleur.
Petit lexique japonais-portugais à l'usage des gastronomes curieux
Je vous laisse démêler les deux langues, c'est plus drôle.
Obrigada ! Merci !
Muito obrigada ! Merci beaucoup !
Arigato gozaimasu ! Merci beaucoup beaucoup !
Arigato gozaimasu ! Merci beaucoup beaucoup !
A manga é bom. La mangue est bonne.
Oishii mango! La mangue est délicieuse !
Itadakimasu. Merci pour ce repas.
Eu gusto. J'aime.
Eu vou probar tudo ! Je veux tout essayer !
Oishii mango! La mangue est délicieuse !
Itadakimasu. Merci pour ce repas.
Eu gusto. J'aime.
Eu vou probar tudo ! Je veux tout essayer !
Production de mangues pour la consommation privée de la famille |
Le lendemain matin, je pars explorer le jardin, un peu gênée par le chaton qui suit tous mes pas.
Jow jow ! |
Le petit déjeuner consiste en une crêpe de tapioca fourrée au fromage et des morceaux de mangue (oishii !).
Ensuite, le clou de la visite : la production de cacao.
N'hésitez pas à cliquer sur les photos pour les agrandir
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C'est ici que tout commence. |
You're beautiful. You're beautiful, it's true. |
Banana tree, you know how I feel. |
Oui, j'ai croqué. C'était amer. |
A ce stade là il a encore la plupart de ses composés phénoliques (les antioxidants), ça se voit à sa couleur rosée.
Le cacao destiné au marché brésilien est séché à l'extérieur sur des bâches, à la merci de la lumière directe du soleil et de la pluie.
J'ai aussi croqué. C'était amer. |
Il y aussi du poivre. J'ai de nouveau goûté, parce que je n'apprends pas. |
Le cacao destiné au Japon est séché sous un toit, à l'ombre et protégé de la pluie.
Pour le cacao européen, on utilise un séchoir mécanique chauffé et doté d'une soufflerie. Ça permet d'effectuer le séchage en moins de 24h et que le cacao conserve la plupart de ses propriétés.
Saviez-vous que la pulpe de cacao se mange ? C'est très gluant, de goût sucré et acidulé, comme un bonbon au citron.
Les fèves de cacao sont à l'intérieur de cette pulpe. |
Je goûte aussi le fruit d'Inga. C'est beaucoup plus sucré, d'une texture et d'un goût qui rappellent une banane.
C'est le cousin de la plante sur laquelle je fais mon mémoire ! |
Après tant d'efforts et d'émotion, le réconfort. Je mords avec reconnaissance (itadakimasu !) dans un tempura que me tend la maîtresse de maison.
Je suis tellement heureuse. |
Le repas fini, il est malheureusement temps de repartir pour la ville. Tout ce week-end je me suis sentie réellement loin, à l'autre bout du monde. J'aurais adoré rester, mais le mémoire m'appelle et il y a tellement de choses à découvrir...
A bientôt !
Aylin